La ville de Duékoué a vécu une tragédie, vendredi dernier, dont le bilan s’alourdit.
Les Frci et les dozos ont mené une attaque contre le camp de Nahibly qui, de façon officielle, abrite
5.087 déplacés. Retour sur le récit des exécutions de plus de 200 civils, selon différentes sources sur le terrain.
Comme Petit-Duékoué et Guitrozon en 2006, le camp des déplacés de Duékoué, a été la cible des forces sanguinaires du régime actuel. Les dozos et les Frci, ont incendié et exterminé les populations civiles dans un camp de déplacés situé dans la ville de Duékoué. Le bilan provisoire dépasse le seuil du tolérable en ce sens que les témoignages concordants évoquent plus de 200 civils Wê massacrés par les dozos et Frci dans le site et à travers toute la ville de Duékoué.
Des témoignages émanant de membres des organisations humanitaires ne contredisent pas le génocide perpétré contre les Wê, vendredi dernier, et qui se poursuit dans les forêts et dans la ville. «Des déplacés pris dans le camp ont été convoyés dans des camions de type Kia. Ils ne sont plus revenus, mais des rescapés soutiennent qu’ils ont été exécutés par les dozos et les Frci», confie un membre d’une organisation humanitaire qui était sur le terrain. Ce dernier qui dit être choqué par ce drame ajoute : «Les dozos et les Frci nous ont trouvés à l’hôpital pour nous empêcher de soigner les nombreux blessés. Le chiffre de 13 morts avancé est insignifiant ».
Une autre source fait état de 28 déplacés du camp qui ont été faits prisonniers par les Frci et dozos avant de libérer 12 d’entre eux. Les 16 autres ont été conduits derrière la mission catholique de Duékoué où se trouve un gros trou. «Les dozos et les Frci nous ont alignés et un à un ils fusillaient leurs proies de sorte que les corps tombent dans ce gros trou. Avant qu’on ne tire sur moi, je suis tombé dans le trou et les autres corps sont tombés sur moi. Croyant qu’on était tous morts, les dozos et les Frci se sont retirés du lieu du massacre», rapporte un rescapé, joint hier au téléphone.
On a déjà 15 morts dans ces circonstances.
DES MASSACRES SAVAMMENT ORCHESTRES
En effet, des témoins qui ont suivi le film de cet assaut génocidaire soulignent clairement que les Frci et les dozos ont encerclé le camp des déplacés avant d’y mettre le feu. Ce qui a créé une véritable panique qui a poussé beaucoup de pensionnaires à escalader la clôture.
Malheureusement, ils sont tombés dans les bras de leurs bourreaux qui les ont systé- matiquement éliminés autour du camp. Ceux qui tentaient de sortir par l’entrée principale ont été tués par balles. Un résidant de Duékoué qui est de l’ethnie Sénoufo nous a confié que ces tueries ont fait 30 morts sur place.
Contrairement à ce que les sources officielles tentent de faire croire, les tueries massives n’ont pas uniquement visé le camp des déplacés. Mais toute la ville et particulièrement les quartiers
habités par les populations autochtones Wê. «Le père de ma copine m’a appelé de la
forêt où il s’est réfugié le jour des évènements et m’a dit que la nouvelle n’est pas
bonne parce que ma camarade a été tuée à la machette dans la ville. Je lui ai conseillé de rester en brousse parce que la situation était toujours dangereuse pour les autochtones», témoigne,
pour sa part, un soldat Frci qui, se trouvait hors de la ville au moment des évènements et qui a du mal à contenir sa colère après l’assassinat de sa dulcinée par ses frères d’arme. Toujours dans la ville, les populations traquées ont été exécutées et jetées dans des puits par les dozos et les Frci.
Comme c’est le cas de ce puits non loin du camp incendié où la Croix Rouge s’attelait encore, hier
Dimanche, à repêcher 7 corps sans vie. Déjà la veille, 63 corps avaient déjà été retrouvés dans un autre trou à l’orée du site détruit. «Nous sommes toujours à la recherche des corps. Parce que ceux qui ont tué ont eux-mêmes emporté des corps», indique une source proche de la Croix Rouge. Une autre source ajoute que des corps ont été cachés dans la forêt qui jouxte le camp incendié.
«Nous avons perdu 3 personnes dans ces circonstances et nous n’avons trouvé que le corps d’un seul. On ne peut pas avoir accès à la forêt où sont disséminés les dozos et les Frci pour le malheur des déplacés qui y ont trouvé refuge. En plus, de nombreux blessés pourraient trouver la mort dans cette brousse», déclare un habitant joint dans la ville. «J’ai passé la nuit de samedi à dimanche
au chevet de mes parents blessés à l’hôpital central de Duékoué. Très tard dans la nuit, un travailleur de la Croix Rouge a déclaré au corps médical que le bilan provisoire des tués s’élevait à
100 morts. Mais, un responsable de la cellule des populations Wê qui dresse les statistiques des blessés et des morts lui a rétorqué que le bilan provisoire était de 206 morts», révèle une dame autochtone interrogée hier.
Benjamin Koré et Félix Téha Dessrait
(Source : Notre Voie n° 4188 du lundi 23 juillet 2012)
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