vendredi 12 août 2011

INTERVIEW EXCLUSIVE AVEC BERNARD HOUDIN, CONSEILLER DU PRESIDENT LAURENT GBAGBO: “ le Président Gbagbo avait dit et répété : « monsieur Ouattara est un menteur »…”






Il a été l’un des conseillers du Président Laurent Gbagbo. Malgré la crise et sa fin tragique il est resté fidèle à celui qui l’a fait connaître aux ivoiriens. Certains l’appellent le «Blanc de Gbagbo » comme pour dire qu’il n’est pas des leurs ou pour lui dire qu’ils ne veulent pas de lui dans la lutte que la galaxie patriotique a engagé contre le pouvoir Ouattara. Mais qu’on se le tienne pour dit. « Blanc de Gbagbo » ou pas, Bernard Houdin ne veut pas lâcher Gbagbo. Il entend batailler dur pour aider à le faire sortir de prison. Pour cela, il multiplie les démarches et les initiatives pour atteindre son objectif. Infodabidjan.net lui a tendu le micro pour savoir ses impressions sur la lutte pour faire sortir le Président Gbagbo de prison. Bernard Houdin a profité de l’occasion pour expliquer pourquoi le Président Gbagbo a porté son choix sur le ministre Katinan pour être son porte-parole.

Infodabidjan: Bonjour monsieur Bernard Houdin. Vous êtiez un des conseillers du Président Laurent Gbagbo. Vous êtes aussi citoyen français. Quelles réflexions vous a inspiré les bombardements de sa résidence et sa capture par les forces françaises ?
Bernard Houdin: Je suis effectivement français d’origine et j’ai acquis la nationalité ivoirienne il y a plusieurs années.
Arrivé en Côte d’Ivoire dans ma prime jeunesse, j’ai suivi toute ma scolarité à Abidjan, de l’école de la RAN au Banco jusqu’au Lycée Classique (génération « Caïman).
Dans ce contexte j’ai vécu l’ensemble de la crise ivoirienne, de 2002 à aujourd’hui comme un gâchis inimaginable dont les Autorités françaises successives porteront la responsabilité devant l’Histoire. Et l’inqualifiable s’est produit quand le président français a ordonné la destruction de la Résidence présidentielle et la capture du Président de la  République par l’armée française, un acte qui entrera dans l’Histoire comme une des pires forfaitures des relations franco-africaines.
Infodabidjan: Le Pr. Mamadou Koulibaly
soutient que le Président Laurent Gbagbo avait perdu les élections. Nous supposons qu’il fait cette afirmation sur la base de preuves tangibles dont vous, le conseiller du président, avez certainement connaissance. Avez-vous demandé au Président Laurent Gbagbo de céder le pouvoir dès lors que les preuves le donnaient perdant des élections ?
B H: Quand j’ai rencontré le Pr M Koulibaly, le 7 juin à Accra, il ne m’a, à aucun moment, soutenu cela. Tout le monde sait que le Président Gbagbo avait gagné effectivement l’élection du 28 novembre. Un seul chiffre l’atteste : le taux de participation du 2ème tour, officiellement annoncé par la CEI à 70,84 % le lundi 29 novembre, confirmé par un communiqué de l’ONUCI et, brutalement, « augmenté » à 82 % dans la « proclamation » du président de la CEI du 2 décembre 2010, dans les conditions que l’on sait.
C’est cette réalité comptable implacable qui fonde mon engagement à défendre le président démocratiquement élu et à combattre la forfaiture commise délibérément par certains dirigeants du monde dit « libre ».

Infodabidjan: Monsieur Houdin, pendant une longue période, l’on a eu l’impression d’un véritable amateurisme dans la coordination des activités et dans la définition même des moyens pour faire pression sur qui de droit afin d’obtenir la libération des détenus. Il ya eu entre-autre le problème de la liste d’avocats du Président Laurent Gbagbo. Certains ont été revoqués puis ont fait leur retour. Dites-nous aujourd’hui qui sont les véritables avocats du président.
B H: La rupture de l’ETAT DE DROIT  constitutionnel, le 11 avril dernier, a pu faire croire à certains qu’ils  pouvaient désormais agir à leur guise. Dans nos sociétés modernes la  prolifération des moyens d’expression, en particulier à travers toutes les  possibilités offertes par l’internet, rend difficile la maîtrise  de l’action politique. Dans le cas des avocats du Président, pour la ligne  officielle, il n’y a jamais eu de discordances. Malheureusement des effets d’annonce, à travers les canaux que j’évoque ci-dessus, ont pu semer le doute dans les esprits. Il faut que tous les ivoiriens mobilisés pour la victoire de la  justice en Côte d’Ivoire fassent confiance au Président Gbagbo et aux  structures qu’il a lui-même mis en place. Le 26 mai dernier, Me Lucie Bourthoumieux était à Korhogo. Dans un mandat ECRIT le Président a renouvelé sa  confiance à Me Odehouri, sa Conseillère Spéciale pour les Affaires Juridiques, afin de coordonner l’action des avocats qu’il a lui-même choisi, en particulier Mes Dumas, Vergès, Ceccaldi et Bourthoumieux, auxquels Me Odehouri a, en tant que de besoin, la latitude d’adjoindre d’autres confrères.

Infodabidjan: Lors de la cérémonie de célébration de l’anniversaire du Président Laurent Gbagbo organisée par monsieur Abel Naki, on vous a entendu dire que le président avait repris les choses en main et aurait signé une « feuille de route ». Quelles sont les grandes ligneS de cette « feuille de route » ?
B H: La feuille de route du Président était déjà claire le 11 avril quand il a déclaré, à l’hôtel du Golf : « la crise militaire est terminée, il  faut régler la partie civile de cette crise pour que le pays reprenne ». Il avait renouvelé ce mot d’ordre lors de la venue des Elders à Korhogo et  il a délivré, dans son message à la Nation à l’occasion de la Fête Nationale, sa vision profonde de la crise et des conditions du renouveau du pays. J’encourage tous les ivoiriens et, au-delà, tous les africains épris de souveraineté et de dignité pour leurs pays respectifs, à s’approprier  ce discours qui montre, une fois de plus, la vision politique et le sens de l’Histoire du Président Gbagbo.

Infodabidjan: On a l’impression que votre combat a pour seul objectif la libération du Président Laurent Gbagbo et son épouse. Ses ex-collaborateurs détenus ont-ils aussi peu d’importance à vos yeux ?
B H: Je connais personnellement chacune des  personnalités détenues de façon inique depuis plusieurs mois et auxquelles le régime actuel, sans doute en proie à une fébrilité liée  aux conditions de son installation, vient de « signifier » des inculpations sans fondements. La libération du Président est la « clé de voute » de notre action et la réussite de celle-ci entrainera, de facto, la libération des uns et des autres.

Infodabidjan: Entre autres mesures prises par le Président Laurent Gbagbo depuis son lieu de détention, il a désigné le Ministre Justin Koné Katinan comme son porte-parole. Ils nous revient cependant que le président et ses ex-collaborateurs sont détenus dans des conditions exécrables et coupés totalement du monde extérieur. Que fait le ministre Koné Katinan pour faire avancer les choses afin d’améliorer leurs conditions de détention ?
B H: Je l’ai déjà dit plus haut, les moyens modernes de communications amplifient la propagation des informations et, le plus souvent, des rumeurs. Cependant les conditions de vie du Président et de tous les détenus sont une préoccupation quotidienne et tous les canaux sont mis à contribution pour l’amélioration de ces conditions. Dans ce genre de situation l’action la plus efficace n’est, généralement, pas la plus bruyante.

Infodabidjan: Expliquez nous le rôle exact du ministre Koné Katinan ? Comment peut-on définir ce rôle rapport à la direction du FPI?
B H: Le ministre Koné Katinan a été, par mandat écrit, désigné par le Président Gbagbo comme son Porte-parole officiel. Je sais, d’expérience, que le Président ne pose jamais un acte à la légère. Le Porteparole est le « lien » entre lui et tous ses partisans. Le choix de l’ancien ministre du Budget n’est pas anodin. Dans une période difficile le Président a voulu promouvoir un homme de
rigueur qui a démontré, dans le gouvernement formé après l’élection du 28 novembre, toutes les qualités pour mériter la confiance du Président. Tous ceux, quelle que soit la structure à laquelle
ils appartiennent, qui veulent s’engager dans le combat du Président doivent, d’abord, accepter ses décisions et sa vision des choses.


Infodabidjan: Mis à part maître Koffigoh qui lui a rendu visite récemment, depuis quand remonte la dernière rencontre entre le Président Laurent Gbagbo et ses avocats ?
B H: La défense du Président s’organise méthodiquement et non pas au gré des effets d’annonce. Ses Conseils sont rompus à ce type de situation où l’émotionnel ne doit pas l’emporter sur la rigueur et la continuité dans l’action.

Infodabidjan: Quel est votre rôle à vous par rapport à cette « feuille de route » ?
B H: Pendant toutes mes années auprès du Président j’ai essayé d’agir sans ostentation, en m’efforçant de remplir honnêtement ma mission. Le choix du Président à mon égard, confirmé par le Porte-parole, tient, peut être, de sa conviction que je travaillerai, sans état d’âme, à la mise en œuvre de sa « feuille de route ».

Infodabidjan: Les observateurs ont l’impression que cette « feuille de route » vous a accordé une place plus importante au détriment de monsieur Alain Toussaint, l’autre conseiller du Président Laurent Gbagbo. Ce qui expliquerait une lutte perfide entre vous et qui fait beaucoup de mal à la lutte patriotique. Est-il aussi difficile que cela de vous asseoir à la même table pour discuter et travailler ensemble ? qu’est-ce qui fait obstruction à une telle demarche ?
B H: La gravité de la situation actuelle rend vaine et dérisoire toute polémique. Les faits sont clairs. Le Président fait des choix, ceux qui se réclament de lui doivent les suivre ou sont libres d’agir selon leur propre entendement. Mais ils ne peuvent pas, dès lors, le faire au nom du Président.
Depuis toujours je m’attache à agir selon un des principes cardinaux du Président : « asseyons nous et discutons ». J’entends et j’observe, ça et là, des  propos et des initiatives peu propices à favoriser un climat serein nécessaire à l’efficacité de la lutte. Ne comptez pas sur moi pour me prêter à ce jeu et à me détourner de l’objectif qui m’a été assigné.

Infodabidjan: Depuis la capture du Président Laurent Gbagbo, il ne se passe pas un seul jour sans que ses partisans et ex-collaborateurs ne soient victimes d’exactions diverses de la part des hommes de monsieur Alassane Ouattara. Quel message lancez-vous à l’adresse des autorités françaises qui ont l’ont soutenu en croyant certainement que cet homme poserait des actes de démocrate ?
B H: La politique menée par les autorités installées par le coup de force des dirigeants français démontre chaque jour sa vraie nature : un pouvoir faible et dissolu, incapable d’instaurer un climat d’apaisement pour rassurer l’ensemble des ivoiriens. Dans ce contexte la déclaration du 1er Ministre français à l’Assemblée Nationale, après le 11 avril, précisant « sa fierté que l’armée française ait contribué à restaurer la démocratie en Côte d’Ivoire » apparait encore plus  cynique alors que nous entrons dans le 4ème mois de gestion de monsieur Ouattara. La France va entrer dans la phase active de la période pré-électorale pour la présidentielle de 2012.  Ses dirigeants seraient bien inspirés de réviser leur vision des choses en Côte d’Ivoire au risque qu’elle soit, pour eux, un clou supplémentaire sur le cercueil de leurs illusions.

Infodabidjan: Malgré les interpellations faites par les organisations de droit de l’homme, dont Amnesty International et Human Right Watch, qui dénoncent ces exactions, monsieur Alassane Ouattara avoue ne pas en être informé. Quelles réflexions cela vous inspire ?
B H: Dans un entretien accordé, pendant la campagne électorale, aux journalistes de France 24 et de RFI, le Président Gbagbo avait dit et répété : « monsieur Ouattara est un menteur ». Soit monsieur Ouattara est informé de ces exactions et il donne encore une fois raison au Président, soit il ne l’est pas et il est disqualifié pour gouverner le pays.

Infodabidjan: Ces exactions continuent toujours. Pendant ce temps, monsieur Alassane Ouattara a lancé une campagne de réconciliation. Croyez-vous qu’il est sincère ?
B H: Monsieur Ouattara fait cette déclaration en même temps que son procureur aux ordres inculpe 12 personnalités proches du Président Gbagbo. De quelle sincérité peut-on parler ?

Infodabidjan: Pour dénoncer ces exactions et demander la libération sans condition des détenus, les ivoiriens de la diaspora s’organisent et organisent des manifestations publiques, dont les marches. Il nous revient que vous déconseillez les marches, pourquoi ?
B H: Je dis et redis qu’il y a un temps pour tout. Après le 11 avril, dans l’émotion des événements, il fallait  montrer que l’on ne se soumettrait pas au diktat de l’étranger. Aujourd’hui est venu le temps du combat « politique », moins ostentatoire mais indispensable. Dans ce contexte les manifestations (marches, rassemblements) doivent être des armes à utiliser à bon escient pour en conserver toute lefficacité. A titre d’exemple, l’an dernier les français sont descendus par millions dans les rues pour manifester leur opposition à la réforme des retraites. M. Sarkozy l’a finalement imposée (avec un Conseil Constitutionnel composé de 9 membres sur 9  de sa famille politique…).
De plus, dans cette période de combat politique, nous devons montrer à l’opinion française et aux médias que nous représentons une «  force tranquille » et ne pas risquer d’être entrainés dans des provocations de toutes sortes. Mais je dis à toutes celles et à tous ceux qui se battent avec nous qu’il leur faut rester mobilisés et  entretenir autour d’eux la flamme de l’espérance.

Infodabidjan: Monsieur Bernard Houdin, vous et votre collaborateur monsieur Claude Koudou avez lancé l’opération « 1 million de bougies pour la Côte d’Ivoire ». Quels objectifs vise cette opération ? Comment se passe concrètement cette opération ?
B H: Claude Koudou travaille en effet en étroite collaboration avec moi et je lui ai demandé de coordonner l’action de toutes les associations et partis politiques qui sont dans notre lutte en France et en Europe. Sa propre organisation a imaginé cette opération « bougies ». Celle-ci est susceptible d’aider au financement de l’action quotidienne car les problèmes pécuniaires sont un obstacle à l’efficacité de cette action. A condition d’agir dans la transparence et d’assurer la traçabilité des sommes recueillies, ces opérations sont légitimes.
Par contre toute « utilisation » de l’image personnelle du Président Gbagbo a été formellement et vigoureusement condamnée par le Porte-parole. Le Président n’est pas un produit de « merchandising » et ceux qui se prêtent à ces opérations se déshonorent. Ils démontrent aussi leur méconnaissance profonde de l’esprit du Président, totalement étranger à ces pratiques.

Infodabidjan: Avez-vous des nouvelles de la mère du Président Laurent Gbagbo ? On avait annoncé son décès. Qu’en est-il ?
B H: La mère du Président va bien et vit auprès des siens à Accra. Lors de mon dernier séjour au Ghana sa fille m’a rassuré à ce sujet.

Infodabidjan: Avez-vous des nouvelles de monsieur Mamadou Ben Soumahoro ?
B H: Mon ami Ben va bien et nous échangeons régulièrement au téléphone. Que l’on ne  se méprenne pas : « Waraba » peut encore bondir !
Infodabidjan: Monsieur Bernard Houdin, nous sommes à la fin de cet entretien. Quel message avez-vous à l’endroit de nos lecteurs ?
B H: Je rentre du Canada où j’ai représenté le Président aux cérémonies organisées par la diaspora ivoirienne à l’occasion du 51ème anniversaire de l’indépendance de la Côte d’Ivoire. J’ai rencontré des hommes et des femmes bien intégrés dans la société canadienne, mais qui se sentent totalement concernés par l’état du pays. C’est une prise de conscience que je retrouve partout où je vais. Cela démontre la justesse du combat du Président qui a toujours privilégié le respect du Droit et qui accepte les pires humiliations pour faire triompher, à la fin, sa vision d’une Côte d’Ivoire moderne et démocratique, qui soit un exemple pour l’Afrique et le monde.
Son message du 7 aout doit être lu, relu et médité par chacun et chacune. Aussi permettez- moi, en conclusion, de donner la parole au Président :
« Mes chers compatriotes, de mon lieu de détention, je continue de garder la foi en notre combat. Comme dans tous les combats il y a des batailles perdues.(…) Qu’une bataille perdue ne nous détourne pas de notre objectif final qui est l’affirmation de notre existence en tant que communauté de destins libre et souveraine (…)
Les grandes puissances qui nous en imposent aujourd’hui sont passées par ces épreuves. Leurs générations actuelles jouissent des dividendes de luttes menées par leurs ancêtres.(…) 
Demeurons toujours mobilisés et confiants. Car, jamais un peuple qui lutte pour acquérir sa liberté n’a été vaincu. C’est aussi une vérité historique »

Interview réalisée par Jean Charles Kambiré pour infodabidjan.net
Source : infodabidjan

1 commentaire:

  1. Voici un compagnon sincère. Que Dieu vous bénisse car nous vaincrons

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